Parentalité collective, une clé de l’évolution

Il y a un million d'années, nos lointains ancêtres ont échappé de peu à l'extinction. Aujourd'hui, c’est plutôt notre capacité à nous reproduire qui menace la survie de nombreuses espèces, y compris la nôtre. Comment expliquer ce surprenant retournement ? Pour les scientifiques, notre comportement prosocial – soit la faculté que nous avons de prendre soin d’autrui de manière désintéressée, et notamment au travers du maternage – pourrait être une clé de compréhension de notre évolution. Après sa naissance, un petit humain s'avère en effet bien moins autonome qu’un nouveau-né appartenant aux autres espèces. Une longue période de maturation lui étant nécessaire, il a besoin d’attention et de stimulation qu’une personne seule, sa mère en premier lieu, peut difficilement lui accorder. Des recherches archéologiques portant sur les pratiques funéraires à l’âge du bronze et du fer ont révélé le rôle social assuré par d’autres femmes que leur mère biologique auprès des jeunes enfants. Plus près de nous, un système d’héritage particulier en vigueur sur la petite île grecque de Karpathos – les cadettes devaient assister leur sœur aînée, seule autorisée à la reproduction – se retrouve sous différentes formes dans d’autres endroits du monde jusqu’à la moitié du XXe siècle…

Double héritage 
Depuis quand la parentalité collective existe-t-elle chez les humains ? Quelles formes a-t-elle prises et qu’a-t-elle apporté à notre espèce ? Si, chez nos cousins les singes, le ouistiti est l’un des rares primates à élever ses petits en communauté, il semble que nous ayons bénéficié d’un double héritage : un cerveau cognitif très performant qui nous vient de nos ancêtres hominidés et un comportement prosocial qui nous permet de coopérer les uns avec les autres. S’appuyant sur les recherches de spécialistes (archéologues, préhistorienne, anthropologues, psychologue du développement…), le documentaire d’Anja Krug-Metzinger  (Les grands singes – Ces primates si proches de l’homme) brosse un état des lieux des dernières connaissances sur la parentalité collective et bat en brèche une idée reçue : la prise en charge exclusive d'un enfant par sa mère ne constitue pas une condition optimale de son développement.